Ewa KLOBUKOWSKA (1946- )

Athlète polonaise

1964-KLOBUKAux Jeux Olympiques de Tokyo, en 1964, Ewa Klobukowska remporta la médaille de bronze dans le 100 mètres et la médaille d’or dans le relais 4 fois 100 mètres. Également championne d’Europe du 100 mètres en 1966, Ewa Klobukowska fut sans doute victime d’une grande injustice en 1967. Lors d’une course à Kiev, elle fut accusée de dopage et, à l’instigation de la Fédération soviétique, elle fut suspendue à vie. En outre, à la suite d’un test de féminité, des médecins déclarèrent qu’elle souffrait s’une «féminité insuffisante». Ewa Klobukowska vécut ce bannissement comme une humiliation. Elle donnera pourtant naissance à un fils dès 1968. On saura rapidement que le test de féminité n’était pas fiable (la méthode utilisée dans son cas sera abandonnée juste après son «contrôle»). Pourtant, ce n’est que dans les années 1990, avec la chute du communisme en Europe de l’Est, qu’Ewa Klobukowska put prouver son innocence et être réhabilitée. Quand on connaît tous les systèmes de dopage d’État instaurés dans les pays communistes à l’époque, qu’une innocente fût suspendue ne manque pas de sel. L’exception qui confirme la règle…

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Abdoulaye SEYE (1934-2011)

Athlète franco-sénégalais

1960-SEYEAbdoulaye Seye remporta une médaille de bronze sur 200 mètres aux Jeux Olympiques de Rome, en 1960, devenant le premier sprinteur français médaillé olympique à titre individuel. Pourtant, Abdoulaye Seye, né au Sénégal, aurait voulu porter d’autres couleurs. Abdoulaye Seye découvrit l’athlétisme en 1954, alors qu’il effectuait son service militaire à Toulon. Il se distingua rapidement, établissant en 1959 les records de France du 100 mètres (10,2 s) et du 200 mètres (20,8 s). En 1960, il établit le record de France du 400 mètres (45,9 s). Abdoulaye Seye souhaitait participer aux Jeux Olympiques de Rome, en 1960, sous les couleurs de la Fédération du Mali (composée du Soudan français et du Sénégal), mais le Comité international olympique (C.I.O.) refusa d’accéder à sa demande. Abdoulaye Seye, français donc, se classa troisième du 200 mètres (20,7 s), derrière l’Italien Livio Berruti (20,5 s) et l’Américain Lester Carney (20,6 s). Dès 1961, Abdoulaye Seye mit en place le Comité olympique sénégalais et devint entraîneur de l’équipe sénégalaise d’athlétisme, poste qu’il conservera jusqu’en 1965. Plus tard, il sera conseiller technique au ministère des Sports du Sénégal.

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Pierre FAILLIOT (1887-1935)

Athlète et rugbyman français

1912-FailliotPierre Failliot, surnommé «L’Autobus», est essentiellement connu comme rugbyman: évoluant au poste d’ailier, il compte huit sélections au sein du XV de France, de 1911 à 1913. Mais Pierre Failliot, par ailleurs excellent joueur de pelote basque, était aussi un athlète complet. Il établit ainsi, en 1908, un record de France du 400 mètres (49,0 s) qui allait tenir vingt ans. Cette performance aurait dû lui permettre de briguer une médaille aux Jeux Olympiques de Londres en 1908, mais il n’y participa pas… Pour une raison bien étrange, selon la chronique : ses parents lui auraient interdit de se rendre à Londres pour ne pas compromette ses études (Pierre Failliot, alors élève au lycée Janson-de-Sailly, sera diplômé de l’École centrale Paris en 1913). Pierre Failliot participera néanmoins aux Jeux Olympiques, en 1912 à Stockholm, obtenant la médaille d’argent dans le relais 4 fois 400 mètres.

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Panayiótis PARASKEVOPÓULOS (1875-1956)

Athlète grec

1896-paraskevopoulosPanayiótis Paraskevópoulos se classa deuxième du concours de lancer du disque lors des premiers Jeux Olympiques d’Athènes, en 1896, ce qui mortifia tous les Hellènes. En effet, le lanceur de disque, magnifié par les artistes de la Grèce antique, à l’image du Discobole de Myron, incarne la perfection athlétique, le canon de l’olympisme. Aussi, pour les Jeux Olympiques renaissants, le peuple espérait la victoire d’un Grec dans ce concours. Et ce d’autant que les seuls concurrents véritablement spécialistes de cette discipline étaient les Grecs. Panayiótis Paraskevópoulos lança le disque à 28,95 mètres, mais un intrus le priva de la victoire: l’Américain Robert Garrett. Ce dernier, sorte d’athlète à multiples facettes, était avant tout un bon sauteur (hauteur et longueur) et un excellent spécialiste du lancer du poids. Le voyage des États-Unis jusqu’en Grèce étant long, Robert Garrett le rentabilisa en s’inscrivant aussi dans l’épreuve de lancer du disque. Or il expédia l’engin à 29,15 mètres, devenant champion olympique devant un public grec mortifié. Panayiótis Paraskevópoulos participa encore aux Jeux Olympiques en 1900, à Paris, mais sans briller: il se classa quatrième du concours de lancer du disque, avec une belle performance (34,04 m), et cinquième du concours de lancer du poids.

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Kinue HITOMI (1907-1931)

Athlète japonaise

1928-HITOMI (2)Kinue Hitomi était une athlète complète, capable de se distinguer dans les épreuves de sprint, de demi-fond, de saut et de lancer. Ainsi, lors Jeux mondiaux féminins de 1926, elle remporta les concours de saut en longueur et de saut en longueur sans élan, se classa troisième du 100 mètres et deuxième du concours de lancer du disque. En 1927 furent organisés les quatrièmes Jeux du sanctuaire Meiji, réunissant deux cents jeunes femmes et servant de sélection pour les Jeux Olympiques d’Amsterdam, en 1928, où les femmes étaient pour la premières fois conviées à participer aux épreuves d’athlétisme. Kinue Hitomi établit plusieurs records du monde, et devint une vedette nationale. À Amsterdam, elle fut retenue pour disputer le 800 mètres. Elle obtint la médaille d’argent, battue par l’Allemande Lina Radke, à l’issue d’un duel intense. On note que les thuriféraires de la « masculinité sportive » émirent de violentes critiques à l’issue de cette épreuve, car certaines concurrentes terminèrent la course épuisées (le Comité international olympique décidera de rayer le 800 mètres du programme jusqu’en 1960). Kinue Hitomi brilla de nouveau aux Jeux mondiaux féminins de 1930, où elle gagna le saut en longueur, se classa deuxième du triathlon, troisième du 60 mètres et du lancer du javelot. Sorte de stakhanoviste de l’athlétisme, Kinue Hitomi, épuisée par l’accumulation des compétitions en Europe, contracta une pneumonie, et décéda des suites de celle-ci en 1931, à vingt-quatre ans.

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Lina RADKE (1903-1983)

Athlète allemande

1928-RADKELa trajectoire sportive de Lina Radke, née Karoline Batschauer, résume la misogynie olympique originelle. En effet, les femmes ne furent autorisées à participer aux compétitions d’athlétisme aux Jeux qu’à partir de 1928, à Amsterdam. Une des cinq épreuves du programme était le 800 mètres. Lina Radke, qui avait entamé sa carrière sportive en 1924, se distinguait dans les courses de demi-fond. En 1927, elle établit le premier de ses six records du monde sur 800 mètres. Elle était donc la favorite de cette épreuve aux Jeux d’Amsterdam, et elle tint son rang: à l’issue d’un beau duel, Lina Radke s’imposa devant la japonaise Kinue Hitomi, devenant la première championne olympique allemande. Mais quelques concurrentes terminèrent épuisées, et les thuriféraires de la «masculinité sportive» en profitèrent pour émettre de violentes critiques concernant la participation féminine aux Jeux. Le Comité international olympique (C.I.O.) décida de rayer le 800 mètres du programme. Jusqu’en 1960, aucune épreuve athlétique d’une distance supérieure à 200 mètres ne fut ouverte aux femmes aux Jeux. Lina Radke établit son dernier record du monde, sur 1000 mètres, en 1930. Installée à Breslau avec son mari, Lina Radke fut expulsée de cette ville devenue polonaise en 1945, et gagna Torgau, en Saxe-Anthalt. Durant sa fuite, elle égara sa médaille d’or olympique: le Comité olympique est-allemand lui offrit une copie en 1956. Le couple Radke s’installa à Karlsruhe en 1961, peu avant la construction du Mur de Berlin.

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Eva DAWES (1912-2009)

Athlète canadienne

1936-DAWESOn pense qu’aucun sportif n’a boycotté les Jeux Olympiques de Berlin, en 1936. Ce n’est pas tout à fait le cas. En effet, la Canadienne Eva Dawes refusa de participer à ces Jeux. Pourtant, Eva Dawes avait obtenu une médaille de bronze aux Jeux Olympiques de Los Angeles en 1932 dans le concours de saut en hauteur (1,60 m), et elle pouvait espérer briller de nouveau aux Jeux en 1936. Mais Eva Dawes détonait. Ainsi, en 1935, elle avait participé à Moscou à une compétition non reconnue par les instances sportives officielles, ce qui lui valut d’être suspendue par la Fédération d’athlétisme du Canada. Cette sanction fut rapidement levée, et Eva Dawes fut sélectionné par le Canada pour les Jeux de Berlin. Eva Dawes refusa cette sélection, et, rejoignant d’autres sportifs canadiens, elle décida de participer à l’olympiade populaire prévue à Barcelone en juillet 1936. Elle déclara ainsi: «Je serai ravie de participer à une olympiade où existera la vraie signification du sport.» Hélas, l’olympiade populaire fut annulée à la suite du pronunciamiento de Franco. Pour autant, Eva Dawes ne se rendit pas à Berlin, où elle aurait pu s’adjuger une médaille. Détail amusant: lors de son voyage retour vers le Canada, Eva Dawes fit escale à Londres, où elle rencontra Arthur Spinks, qui deviendra son mari.

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Émile TORCHEBOEUF (1876-1950)

Athlète français

1900-TORCHEBOEUF (2)Émile Torcheboeuf était un athlète éclectique. Ainsi, il brillait au lancer du poids et du disque, se distinguait en saut à la perche. Mais il était aussi un spécialiste des sauts sans élan: il obtint la médaille de bronze dans le concours de saut en longueur sans élan aux Jeux Olympiques de Paris, en 1900, avec un bond de 3,03 mètres. Il se dit qu’Émile Torcheboeuf, surnommé la «Grenouille de Saint-Ouen», avait une hygiène alimentaire exemplaire, fondée sur la consommation de fruits et légumes. On pense qu’Émile Torcheboeuf s’engagea dans la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale. Grâce à ses talents de sauteur, il pouvait de traverser les champs de mines et mener des missions d’infiltration stratégiques. Tout cela demeure sujet à caution, car on a perdu la trace d’Émile Torcheboeuf.

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Tom KIELY (1869-1951)

Athlète irlandais

1904-KIELYTom Kiely mérite bien mention au titre de l’olympisme inattendu, car il remporta une médaille d’or dans une épreuve non encore standardisée et pour le compte d’un pays qui n’était pas le sien et qu’il ne voulait pas représenter. En effet, en 1904 aux Jeux Olympiques de Saint Louis, Tom Kiely s’adjugea une médaille d’or dans la compétition dénommée All-around, une sorte d’ancêtre du décathlon, comprenant le 100 yards, le lancer du poids, le 880 yards à la marche, le lancer du marteau, le saut à la perche, le 120 yards haies, le lancer du poids de 56 livres, le saut en longueur et le mile. À l’époque, l’Irlande n’était pas indépendante, et Tom Kiely, invité par les organisateurs américains, indiqua expressément qu’il ne voulait pas représenter la Grande-Bretagne. Ce fut le cas, car, durant les premiers temps des Jeux, on s’inscrivait de manière individuelle. Le mérite de Tom Kiely est d’autant plus grand que la Grande-Bretagne lui avait proposé d’intégrer son team, prenant donc en charge ses frais, puis les États-Unis lui offrirent leur parrainage. Nationaliste irlandais convaincu, Tom Kiely repoussa toutes ces propositions et, pour couvrir les frais de son voyage, il vendit plusieurs trophées sportifs qu’il avait remportés auparavant. Or, dans les palmarès officiels, le Comité international olympique (C.I.O.) attribue la médaille d’or de Tom Kiely à la Grande-Bretagne, faisant fi de la volonté du champion.

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Frantisek JANDA-SUK (1878-1955)

Athlète bohémien

1900-SUKLa Bohême en tant que telle ne compte qu’un médaillé olympique : Frantisek Janda-Suk, deuxième du concours de lancer du disque aux Jeux Olympiques de Paris, en 1900 (35,25 m), battu par Rudolf Bauer, représentant l’Empire austro-hongrois (36,04 m). Si Frantisek Janda-Suk mérite mention au titre de l’olympisme inattendu, c’est parce qu’il est considéré comme l’inventeur de la technique moderne du lancer du disque. Il fut le premier athlète de l’ère moderne à lancer le disque en rotation, technique qu’il a inventé après avoir étudié la statue du Discobole de Myron. Il a établi son record personnel en 1909, avec un jet de 42,45 mètres, ce qui demeure une performance modeste. Frantisek Janda-Suk participa encore aux Jeux en 1912, se classant dix-septième du concours de lancer du disque et quinzième du concours de lancer du poids, puis en 1920, sous les couleurs de la Tchécoslovaquie naissante (29e au lancer du disque, à 42 ans).

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