Karin RICHERT-BALZER (1938- )


Athlète est-allemande

La trajectoire de Karin Richert-Balzer, championne olympique en 1964 à Tokyo (80 mètres haies), illustre bien le rôle de la Stasi au sein du mouvement sportif de la R.D.A. Ainsi, la jeune Karin Richert, qui étouffait en R.D.A., passa à l’Ouest, avec son compagnon et entraîneur Karl-Heinz Balzer, en juillet 1958. Or, deux mois plus tard, le couple retourna en R.D.A. : la Stasi menaçait de s’en prendre à la famille de la jeune athlète si celle-ci ne revenait pas « au pays ». Elle s’exécuta, tout comme Karl-Heinz Balzer, pourtant très réticent. Dès lors, la Stasi va présenter Karin Richert-Balzer comme une « repentie », la contraindre à critiquer la vie à l’Ouest…

Malgré toute cette pression, Karin Richert-Balzer parvient à briller sur les pistes : en 1964, elle bat le record du monde du 80 mètres haies, puis devient championne olympique à Tokyo, sous les couleurs de « l’équipe unifiée d’Allemagne ». Devenue mère en 1965, elle reprend vite la compétition et remporte le 80 mètres haies aux Championnats d’Europe de Budapest. En 1968, année de la première participation de la R.D.A. en tant qu’État aux Jeux Olympiques, elle est désignée porte-drapeau de la délégation de la R.D.A. : il s’agit plus d’une « punition » que d’un honneur, cette décision se situant dans le droit fil de la propagande de la Stasi – qui mieux qu’une « repentie » pouvait symboliser l’arrivée de la R.D.A. aux Jeux ? À Mexico, Karin Richert-Balzer ne se classe que cinquième du 80 mètres haies remporté par l’Australienne Maureen Caird.En 1969, pour les femmes, le 80 mètres haies laisse la place au 100 mètres haies. Karin Richert-Balzer n’en continue pas moins de briller : elle bat quatre fois le record du monde, devient la première femme à casser la barrière des 13 secondes sur la distance (12,9 s, septembre 1969), remporte l’épreuve aux Championnats d’Europe d’Helsinki, en 1971.

Le 8 septembre 1972, elle se trouve au départ de la finale du 100 mètres haies aux Jeux Olympiques de Munich, car son mari lui a caché que leur fils s’est tué la veille dans un accident de la route : elle obtient la médaille de bronze. Sa carrière sportive prend fin.

Dès lors, avec son mari, elle entraîne de jeunes athlètes. La vie du couple est difficile, d’autant plus qu’ils refusent de donner des stéroïdes aux athlètes qu’ils préparent : la Stasi les surveille en permanence ; on les contraint à plusieurs déménagements forcés (« relogements », selon le vocabulaire de la Stasi). En novembre 1989, le Mur de Berlin tombe. Mais, selon son fils, Karin Richert-Balzer a toujours peur que ça revienne comme avant ».

©Pierre LAGRUE


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