Le Canadien Percy Williams, un athlète de vingt ans quasi inconnu, réalisa le doublé 100-200 mètres aux Jeux Olympiques d’Amsterdam en 1928 à la surprise générale. Dans le 100 mètres, sa victoire était tellement inattendue que la cérémonie de remise des médailles fut différée afin que les officiels aient le temps de trouver un drapeau canadien ! Les supporters canadiens voulurent fêter leur nouveau héros, et ils se rendirent à son hôtel pour l’ovationner. Or Percy Williams était tellement peu connu qu’il se trouvait à ce moment non pas dans son hôtel, mais à l’extérieur, au milieu de ces supporters : il put rester au cœur de cette foule et se « fêter lui-même » !
L’athlète américain Joie Ray, chauffeur de taxi, participa aux Jeux Olympiques en 1920 à Anvers, en 1924 à Paris et en 1928 à Amsterdam. Il n’obtint qu’une médaille, en bronze, dans l’épreuve de 3 000 mètres par équipes en 1924. En 1928, à Amsterdam, il participa au marathon et prit la cinquième place, grâce à un grand courage : ses pieds avaient tellement gonflé qu’il fut impossible d’ôter ses chaussures ; il fallut donc découper ses chaussures ! On note que Joie Ray fit souvent preuve de courage et goûtait à diverses activités ; ainsi, en 1928, il participa à un marathon de danse – une activité qui sert de trame au film On achève bien les chevaux de Sydney Pollack (1969 – de plus de 1 700 heures, puis au marathon athlétique de Boston, se classant troisième à l’issue de grandes souffrances dans les derniers kilomètres.
Le dénouement du concours de saut à la perche des Jeux de Moscou, en 1980, demeure dans les mémoires. Ce concours se déroula dans une ambiance détestable : le public du stade Lénine, désireux de voir triompher le Soviétique Konstantin Volkov, huait tous les rivaux de celui-ci quand ils sautaient ; rapidement, au fil des échecs de tous les concurrents, le concours se transforma en un duel opposant Konstantin Volkov au Polonais Wladyslaw Kozakiewicz. Ce dernier, dans un jour de grâce, effaça toutes les barres avec une grande aisance, jusqu’à 5,75 mètres – une barre que Volkov ne parvint pas à franchir. Après les échecs de Volkov, le moustachu Kozakiewicz, médaillé d’or de fait, demanda que la barre fût placée à 5,78 mètres, afin d’ajouter le record du monde détenu par le Français Philippe Houvion (5,77 m) au titre olympique. À son deuxième essai, le Polonais franchit la barre avec aisance ; sourire aux lèvres, il adressa, provocateur, un bras d’honneur au public du stade Lénine. L’image de la « célébration » de Wladyslaw Kozakiewicz fit alors le tour du monde occidental, en cette époque où la guerre froide connaissait un moment de haute tension : les médias de l’Ouest présentèrent ce geste comme un bras d’honneur adressé par le Polonais à l’ensemble du monde communiste ; en fait, le « Marin du la Baltique », comme on le surnommait, voulut simplement protester contre le chauvinisme du public et manifester sa désapprobation contre le déroulement de ce concours. Néanmoins, l’ambassadeur d’Union soviétique en Pologne demanda au C.I.O. de retirer la médaille d’or de Kozakiewicz pour « insulte au peuple soviétique ». Le gouvernement polonais affirma, quant à lui, que le geste de l’athlète n’était que la conséquence d’un « spasme musculaire ».
Ludmila Engquist présente plusieurs
singularités : elle débuta l’athlétisme tardivement, alors qu’elle était
déjà mère de famille, représenta deux pays sur la scène internationale, fut la
première Suédoise couronnée championne olympique en athlétisme et fut prise
dans des affaires de dopage mal éclaircies.
Alors dénommée Ludmila Narozhilenko, mère de famille
depuis 1984, elle apparaît sur la scène sportive en 1986, sur le 100 mètres
haies. Elle progresse, est sélectionnée dans l’équipe d’U.R.S.S. pour les Jeux
Olympiques de Séoul, en 1988. Faisant partie des favorites, elle est éliminée
sur chute en demi-finale. Aux Jeux de Barcelone, en 1992, grande favorite, elle
se blesse en quart de finale. En 1993, elle est suspendue quatre ans pour usage
de stéroïdes ; elle proteste, indiquant que ces produits étaient dus à une
prise de médicaments administrés à son insu dans un hôpital, après qu’elle
s’était évanouie à la suite du décès de sa mère. Fin 1995, les instances lèvent
sa suspension pour « circonstances exceptionnelles ».
Peu de temps auparavant, elle avait épousé Johan Engquist,
un homme d’affaires suédois. En juin 1996, elle obtient la nationalité
suédoise, participe désormais aux compétitions internationales sous le maillot
de la Suède et sous son nom d’épouse, Ludmila Engquist. Quelques semaines plus
tard, elle remporte le 100 mètres haies aux Jeux Olympiques d’Atlanta, devenant
la première « Suédoise » couronnée championne olympique en
athlétisme. En 1997, elle devient championne du monde à Athènes.
En 1999, on lui diagnostique un cancer du sein :
courageuse, Ludmila Engquist reprend sa carrière sportive après sa
chimiothérapie et, en 1999, elle obtient une magnifique médaille de bronze aux
Championnats du monde de Séville. La belle histoire se termine en 2002 :
alors qu’elle tente une reconversion dans le bobsleigh, elle est de nouveau
contrôlée positive aux stéroïdes.
Ole Imerslun Reistad fut avant tout militaire. Mais il fait partie des rares sportifs à avoir participé aux Jeux Olympiques d’été et aux Jeux Olympiques d’hiver. D’abord, il disputa le pentathlon moderne aux Jeux Olympiques d’été d’Anvers en 1920 (il abandonna durant la compétition) : rappelons que le pentathlon moderne, inventé par Pierre de Coubertin, est une discipline évoquant le parcours d’un militaire. Ensuite, aux Jeux Olympiques d’hiver de Saint-Moritz, avec l’équipe de Norvège, il remporta une épreuve qui semblait faite pour lui : la patrouille militaire, ancêtre du biathlon et qui avait le statut de sport de démonstration. Durant la Seconde Guerre mondiale, Ole Imerslun Reistad dirigea la Petite Norvège, un camp de formation pour la force aérienne royale norvégienne basé au Canada.
Percy Williams réalisa le doublé 100-200 mètres aux Jeux Olympiques d’Amsterdam en 1928 à la surprise générale. En effet, ce frêle athlète de vingt ans était quasi inconnu avant cette compétition. Pourtant, il gagna d’abord le 100 mètres, devant le Britannique John London et l’Allemand Georg Lammers : sa victoire était tellement inattendue que la cérémonie de remise des médailles fut différée afin que les officiels aient le temps de trouver un drapeau canadien ! Dans le 200 mètres, après un départ prudent, il remonta ses concurrents et remporta sa seconde médaille d’or olympique, devant le Britannique Walter Rangeley et l’Allemand Helmut Körning. Percy Williams fut accueilli en héros au Canada, puis il confirma qu’il était un athlète de valeur : en 1930, il établit un nouveau record du monde du 100 mètres (10,3 s) et remporta le 100 yards des premiers Jeux de l’Empire britannique (ancêtres des Jeux du Commonwealth), en battant le record du monde (9,6 s), mais il se blessa. Il ne retrouva jamais la forme, fut éliminé en demi-finale du 100 mètres aux Jeux Olympiques de Los Angeles en 1932, et prit sa retraite sportive. Bien plus tard, il donna ses médailles olympiques au BC Sports Hall of Fame, afin que chacun puisse les admirer. Mais celles-ci furent volées quelques jours plus tard ! Moins amusant : souffrant d’arthrite et de solitude, il se suicida avec une arme à feu qui lui avait été offerte en 1928 en récompense de ses triomphes olympiques.
Meyer Prinstein, spécialiste du saut en longueur et du triple saut, a remporté trois médailles d’or aux Jeux Olympiques, mais il devrait sans doute en compter cinq. En effet, aux Jeux de Paris, en 1900, Meyer Prinstein réussit une excellente performance (7,17 mètres) dans le concours de qualification du saut en longueur. À l’époque, les performances réalisées lors des épreuves de qualification étaient prises en compte pour établir le classement définitif, et Meyer Prinstein pensait donc que cet excellent saut lui vaudrait la victoire ; en effet, la finale se déroulait un dimanche, et l’université de Syracuse, qu’il représentait, interdisait à ses athlètes de participer à cette compétition en ce jour du Seigneur. Son compatriote Alvin Kraenzlein, qui défendait les couleurs de l’université de Pennsylvanie, fut au contraire autorisé à prendre part à la finale : ce dimanche-là, il parvint à améliorer d’un petit centimètre la performance de Prinstein, lequel se vit privé du titre olympique. Cette situation causa un malaise, car Kraenzlein aurait indiqué à Prinstein que lui non plus ne concourrait pas un dimanche… Durant ces Jeux de Paris, Meyer Prinstein remporta néanmoins le triple saut. En 1904, aux Jeux de Saint Louis, il s’adjugea deux médailles d’or en se montrant très supérieur à ses concurrents dans les épreuves du saut en longueur (7,34 m) et du triple saut (14,35 m). En 1906, aux « Jeux intercalaires » d’Athènes, il s’adjugea une nouvelle médaille d’or dans le concours de saut en longueur ; mais, un demi-siècle plus tard, le Comité international olympique (C.I.O.) décidera de rayer ces « Jeux intercalaires » d’Athènes des palmarès.
Alvin Kraenzlein fut le premier athlète à remporter quatre titres lors d’une même édition des Jeux Olympiques, en l’occurrence à Paris en 1900. Il est considéré comme l’inventeur de la technique moderne de la course de haies. En effet, il mit au point pour les courses de haies une technique innovante consistant à franchir la haie jambe tendue. En outre, il excellait en sprint et en saut en longueur. Aux Jeux Olympiques de Paris, en 1900, il remporta le 60 mètres plat, le 110 mètres haies, le 200 mètres haies, mais aussi le concours de saut en longueur, ce qui fit polémique. En effet, le détenteur du record du monde, son compatriote Meyer Prinstein, avait terminé en tête du concours de qualification avec un saut de 7,17 mètres. Prinstein, qui comme les autres athlètes de l’université de Syracuse n’avait pas le droit de concourir le dimanche, était donc absent lors de la finale de l’épreuve. Il espérait néanmoins que la performance qu’il avait réalisée lors des qualifications lui permettrait de remporter le titre. Or Kraenzlein, qui défendait les couleurs de l’université de Pennsylvanie, laquelle autorisait ses étudiants à concourir le dimanche, sauta à 7,18 mètres : Kraenzlein, qui avait indiqué à Prinstein que lui non plus ne concourrait pas un dimanche, remporta ainsi la médaille d’or, ce qui provoqua des tensions dans l’équipe américaine.
Le concours de saut à la perche des Jeux Olympiques de Paris, en 1900, se déroula le dimanche 15 juillet. Les Américains protestèrent contre cette programmation, car la plupart ne voulaient pas concourir le jour du Seigneur. Un compromis fut trouvé : les organisateurs français décidèrent de maintenir le début de concours en ce jour du Seigneur, mais précisèrent que les Américains pourraient sauter le lundi s’ils le désiraient, et que le classement final se ferait à l’issue des deux concours. Or, au dernier moment, les organisateurs français firent volte-face, et un seul concours, celui du dimanche, serait organisé. De ce fait, les meilleurs Américains – Charles Dvorak, Dan Horton et Bascom Johnson – ne se trouvaient pas sur le terrain de la Croix-Catelan quand commença le concours du dimanche. Il était trop tard pour que les trois Américains – même s’ils avaient décidé de ne pas respecter le jour du Seigneur – y participent. En toute hâte, deux autres Américains, Irving Baxter, qui venait de remporter le saut en hauteur, et Meredith Colket, se rendirent sur le sautoir : Baxter s’imposa (3,30 m), devant Colket (3,25 m). Les Américains protestèrent vigoureusement. Pour calmer leur courroux, on organisa deux autres concours de saut à la perche, de manière « officieuse » : Bascom Johnson remporta le premier (3,38 m) ; Dan Horton remporta le second (3,45 m), devant Charles Dvorak (3,35 m). Tous firent donc mieux que le champion olympique – mais le palmarès ne fut pas modifié pour autant.
Les épreuves des Jeux Olympiques de Paris, en 1900, se déroulèrent à Croix-Catelan, dans le bois de Boulogne, dans un stade peu adapté pour la compétition : ovale de 500 mètres dessiné dans l’herbe en guise de piste ; pas de fosse de réception pour les sauts ; présence du public hors des gradins… Une des vedettes de ces Jeux fut l’Américain Irving Baxter, qui remporta deux médailles d’or (saut en hauteur, saut à la perche) et trois médailles d’argent, dans les concours de sauts sans élan (hauteur, longueur, triple saut). Il réalisa sa plus belle performance dans la compétition de saut en hauteur, en franchissant 1,90 mètre. Assuré de la médaille d’or, il décida de s’attaquer au record du monde, et demanda que la barre fût placée à 1,95 mètre. Or les spectateurs, enthousiastes, voulurent être au plus près pour voir l’exploit. En fait, la foule envahit la zone de saut… et Irving Baxter, pris dans la cohue – ce qui lui interdisait de prendre son élan – décida de renoncer à tenter le record et mit fin à son concours.