Walter TEWKSBURY (1878-1968)

Athlète américain

Walter Tewksbury a réussi l’exploit de se classer dans les trois premiers à l’occasion des cinq épreuves auxquelles il participa lors des Jeux Olympiques de Paris en 1900. Walter Tewksbury étudia la médecine dentaire à l’université de Pennsylvanie. Fraîchement diplômé, il participa donc aux Jeux Olympiques de 1900 à Paris. Il disputa cinq épreuves et se distingua à chaque fois : il gagna le 200 mètres et le 400 mètres haies, se classa deuxième du 100 mètres, en ayant tenu la dragée haute à son compatriote Frank Jarvis, et du 60 mètres, devancé par le célèbre Américain Alvin Kraenzlein, et troisième du 200 mètres haies.

Mais sa performance la plus surprenante fut son succès dans la course de 400 mètres haies. Pour Tewksbury, cette épreuve constituait une inconnue : il ne s’y était jamais essayé, la course de haies d’un tour de piste n’existant pas à cette époque aux États-Unis ; en outre, il affrontait un concurrent hors pair en la personne du Français Henri Tauzin, une vedette du Racing-Club, qui multipliait les victoires dans cette discipline. L’une des caractéristiques de ces Jeux de Paris fut l’organisation chaotique des compétitions : le 400 mètres haies n’échappa pas à la règle, bien au contraire. Sur la piste en herbe du stade de la Croix-Catelan, les haies furent disposées de façon très artisanale : certaines étaient des morceaux de poteaux télégraphiques tandis qu’une sorte de rivière constituait le dernier obstacle à franchir ! Or Walter Tewksbury causa la surprise : il s’imposa, réalisant 57,6 secondes, un temps proche du record du monde, et devança Henri Tauzin.

Pour Walter Tewksbury, l’athlétisme n’était qu’un passe-temps. De retour dans son pays après ses exploits parisiens, il arrêta la compétition pour se consacrer à son métier de dentiste.

©Pierre LAGRUE



Andreï PERLOV (1961- )

Athlète russe

Andreï Perlov remporta le 50 kilomètres marche aux Jeux Olympiques de Barcelone, en 1992. Mais c’est un an plus tôt, aux Championnats du monde de Tokyo, qu’il était entré dans l’histoire du sport, grâce à une belle image de fraternité gâchée par un jury tatillon. Dans le 50 kilomètres, au terme d’une lutte de près de 4 heures avec son compatriote Aleksandr Potashov, les deux hommes se trouvaient au coude-à-coude en pénétrant dans le stade. Or, plutôt que de se disputer la victoire au sprint, ils décidèrent de franchirent ensemble la ligne d’arrivée en se tenant par l’épaule. Mais le jury n’admit pas ce dénouement fraternel marqué du sceau du fair-play, et il examina la photo-finish : après cet examen, il attribua la médaille d’or à Potashov, la médaille d’argent à Perlov, au grand dam des deux amis. Notons que le jury aurait pu être encore plus sévère : ce type de comportement sportif (ne pas se disputer la victoire) peut valoir une disqualification !

©Pierre LAGRUE



Charles DVORAK (1878-1959)

Athlète américain

Sauteur à la perche, Charles Dvorak fut champion olympique en 1904 à Saint Louis (3,50 m). Mais ce précurseur (il fut le premier sauteur à utiliser une perche souple en bambou au lieu des lourdes perches en frêne ou en noyer) aurait peut-être déjà pu être champion olympique en 1900 à Paris. En effet, le concours était prévu un dimanche. Or, pour de nombreux sportifs américains, il paraissait difficile, voire impossible, de concourir le jour du Seigneur. Aussi les organisateurs décidèrent-ils de reporter l’épreuve au lundi. Charles Dvorak, qui se trouvait sur le terrain de la Croix-Catelan ce dimanche, quitta donc le stade. Mais, dans le capharnaüm de ces Jeux, les organisateurs firent volte-face au dernier moment, et reprogrammèrent le concours ce dimanche. Or Charles Dvorak n’eut pas le temps de revenir à la Croix-Catelan ! Son compatriote Irving Baxter, qui venait de remporter l’épreuve de saut en hauteur, décida de compléter son programme dominical : avec une performance modeste (3,30 m), il devint également champion olympique de saut à la perche !

©Pierre LAGRUE



Harry PORTER (1882-1965)

Athlète américain

Étudiant à l’université Cornell, Harry Porter ne commença vraiment à s’intéresser au sport qu’un fois son diplôme en poche. Il se spécialisa dans le saut en hauteur et obtint de jolis résultats : il fut champion des États-Unis en 1907 et en 1908. Surtout, en 1908 aux Jeux Olympiques de Londres, il s’adjugea la médaille d’or (1,905 m).

©Pierre LAGRUE



Alfred GILBERT (1884-1961)

Athlète américain

Alfred Gilbert était un sportif talentueux, mais aussi un esprit inventif. Ainsi, durant ses études l’université du Pacifique de Stockton, il s’essaya à l’haltérophilie et au football américain. En 1902, il partit étudier la médecine à l’université Yale et décida, sur le plan sportif, de se consacrer au saut à la perche. Inventif, il sautait avec une perche en bambou quand la majorité des perchistes se servaient de perches en bois ; surtout, il eut l’idée de creuser un trou devant le sautoir, alors généralement en sable, pour assurer la stabilité de sa perche quand il sautait (cette invention sera reprise et est toujours utilisée de nos jours sous la forme d’un butoir). Grand favori du concours aux Jeux Olympiques de Londres, il fut handicapé par les officiels britanniques, qui lui interdirent d’utiliser sa perche en bambou et de creuser un butoir. Malgré ces contrariétés, Alfred Gilbert, tout comme son compatriote Edward Cook, franchit 3,71 mètres. Or, stupeur : les officiels décidèrent de mettre un terme au concours, car les concurrents du marathon allaient bientôt pénétrer dans le stade. Le jury décida donc d’attribuer deux médailles d’or. Après sa carrière sportive, Alfred Gilbert mit à profit son esprit « bricoleur » en devenant inventeur de jouets.

©Pierre LAGRUE



Edward COOK (1888-1972)

Athlète américain

Edward Cook fut un athlète éclectique, capable de briller dans les courses de sprint et de haies, en saut en longueur, en saut en hauteur et en saut à la perche. C’est dans cette dernière discipline qu’il obtint une médaille d’or olympique, en 1908 aux Jeux de Londres, à l’issue d’un curieux scénario. En effet, tout comme son compatriote Alfred Gilbert, il avait franchi 3,71 mètres. Or les officiels décidèrent de mettre un terme au concours, car les concurrents du marathon allaient bientôt pénétrer dans le stade. Le jury décida donc d’attribuer deux médailles d’or : il s’agit d’un cas unique pour le saut à la perche aux Jeux Olympiques. Edward Cook, champion universitaire des États-Unis de saut en longueur en 1908 et en 1909, champion des États-Unis de saut à la perche en 1907 et en 1911, fut diplômé de l’université Cornell en 1910. Il devint par la suite directeur de la First National Bank.

©Pierre LAGRUE



Bobby KERR (1883-1963)

Athlète canadien

Né en Ulster, Bobby Kerr émigra en Ontario avec ses parents à l’âge de 5 ans. Pompier de profession, il se mit à la course à pied et réalisa de bonnes performances. Aussi, il dépensa toutes ses économies pour se rendre à Saint Louis en 1904, et participer aux Jeux Olympiques, où il n’obtint aucun résultat. Il persévéra, établit plusieurs records du Canada dans les courses de sprint, et se présenta aux Jeux de Londres en 1908 en tant que favori des 100 et 200 mètres. Médaillé de bronze du 100 mètres, il remporta le 200 mètres (22,6 s). Durant la Première Guerre mondiale, il servit dans les Forces expéditionnaires du Canada en tant qu’officier. La paix revenue, il entraîna des équipes d’athlétisme et de football à Hamilton. Surtout, il travailla pour l’Association olympique canadienne, et fut, en 1930, un des maîtres d’œuvre de l’organisation des premiers Jeux de l’Empire britannique, qui se tinrent à Hamilton.

©Pierre LAGRUE



Charles BACON (1885-1968)

Athlète américain

Aujourd’hui, Charles Bacon ne serait pas sacré champion olympique du 400 mètres haies. Ce champion américain d’origine irlandaise le fut pourtant, en 1908 aux Jeux de Londres, malgré une faute technique : durant la finale, il changea brièvement de couloir et franchit la mauvaise haie. Néanmoins, il ne fut pas disqualifié, car le jury considéra qu’il n’avait pas bénéficié d’un avantage. Il est vrai qu’il devançait son compatriote Harry Hillman, et qu’une disqualification n’aurait pas bénéficié à un Britannique. On note que, durant les séries, Charles Bacon avait établi une nouvelle meilleure performance mondiale (57,0 s), améliorée par Harry Hillman en demi-finale (56,4 s). En finale, Charles Bacon s’imposa en 55,0 s. En 1912, quand elle établira la première liste officielle des records du monde, la Fédération internationale d’athlétisme considérera ce temps comme le premier record du monde du 400 mètres haies, sans tenir compte du fait que Charles Bacon s’était trompé de couloir. Harry Hillman, quant à lui, avait été sacré champion olympique en 1904 à Saint Louis, en 53,0 s (mais la hauteur des haies était de 76 cm et non pas de 91 cm comme c’est la norme). Charles Bacon avait déjà participé aux Jeux de Saint Louis, en 1904, sur 1 500 mètres, et aux « Jeux intercalaires » d’Athènes, en 1906, sur 400 et 800 mètres, sans obtenir de médaille.

©Pierre LAGRUE



Natalia PECHENKINA (1946- )

Athlète soviétique

PECHEN (2)Quasi inconnue avant les Jeux Olympiques de Mexico en 1968, Natalia Pechenkina a failli causer la surprise sur 400 mètres : longtemps en tête, elle se classa finalement troisième, la victoire allant à une autre championne alors quasi inconnue : Colette Besson. En 1970, elle épousa le hurdler Valentin Chistiakov et, sous son nom de femme mariée, Natalia Chistiakova, elle obtint une médaille de bronze avec le relais 4 fois 400 mètres soviétique lors des Championnats d’Europe en 1971. Détail amusant : le couple s’installa en Australie et leur fils, Viktor Chistiakov, se classa cinquième du concours de saut à la perche aux Jeux Olympiques de Sydney, en 2000. Autre détail : sa petite-fille, Elizabeth Parnova, est aussi une perchiste de niveau international ! Bon sang ne saurait mentir.

©Pierre LAGRUE



Lee EVANS (1947-2021 )

Athlète américain

EVANSLee Evans, entraîné par Bud Winter au San Jose State College, fut champion des États-Unis du 400 mètres en 1966 et 1967. Il préparait les Jeux de Mexico. Des Jeux auxquels il aurait bien pu ne pas participer, tout comme Tommie Smith et John Carlos. Les trois hommes, voulant protester contre la discrimination raciale qui sévissait aux États-Unis, réclamaient notamment qu’un entraîneur noir figurât dans l’encadrement de l’équipe américaine d’athlétisme. Ils furent entendus sur ce point.

Lee Evans alla au bout de ses ambitions et devint champion olympique du 400 mètres en 1968 à Mexico, en établissant un fabuleux record du monde (43,86 s), qui tiendra jusqu’en 1988. Ce 18 octobre 1968, il devançait ses compatriotes Larry James et Ron Freeman. Sur le podium, en solidarité avec Tommie Smith et John Carlos, qui avaient levé un poing ganté de noir sur le podium du 200 mètres pour protester contre la discrimination raciale aux États-Unis, ce qui leur valut de se voir exclus des Jeux, les trois hommes, coiffés du béret du Black Power et poing levé, écoutèrent distraitement l’hymne américain. Avec ses deux équipiers et Vincent Matthews, Lee Evans fut également champion olympique du 4 fois 400 mètres (2 min 56,1 s, record du monde). À l’instar de Tommie Smith et John Carlos, même s’il n’a pas été exclu du village olympique, Lee Evans vit, en raison de son action, sa carrière s’achever ainsi. Il deviendra par la suite entraîneur d’athlétisme en Afrique.

Lee Evans n’a jamais regretté son comportement sur le podium à Mexico, même si celui-ci lui a coûté sa carrière sportive. Il déclarait ainsi en 2008 au sujet de son attitude et de celle de ses compatriotes : « Ces actes politiques ont largement dépassé le cadre du sport. Des proches de Malcolm X m’ont dit que ce que nous avions fait avait joué un rôle considérable dans un mouvement qui a finalement abouti à la reconnaissance, par les États-Unis, de l’égalité des Noirs et des Blancs. »

©Pierre LAGRUE